James Samuel Wonja Michael (1916-2007), entre Troupe de sauteurs marocains et Légion étrangère

James Michael naquit à Berlin en 1916. Fils de Theophilus Wonja, colon installé au Kamerun allemand et de Martha (née Wegner) de nationalité allemande, il était le deuxième enfant d’une fratrie de quatre. En 1926, sa mère mourut des suites d’une longue maladie. Depuis l’enfance, James et ses trois frères et sœurs Christiane, Juliana et Theodor durent subvenir aux besoins de la famille démunie en se faisant passer avec leur père pour des « Africains sauvages » et en participant à des « expositions ethnologiques ». À l’âge de douze ans, James rejoignit la troupe de sauteurs marocains « 10 Abdullah Ben Mohamed Bonamannes » où il suivit une formation d’acrobate « arabe » au sommet d’une pyramide humaine. Entre 1929 et 1932, la troupe se produisit dans les cirques Holzmüller et Strassburger.

Publicité pour la troupe de sauteurs marocains  «10 Abdullah ben Mohamed Bonamannes» In: Das Programm, Nr. 1644, 8.10.1933 (Stadtmuseum Berlin; reproduction: Siegfried Reinsch)

Lorsqu’Hitler accéda au pouvoir en janvier 1933, la troupe marocaine quitta l’Allemagne et reçût un engagement au cirque Amar. Des publicités dans le journal de cirque et de variétés “Das Programm” indiquent néanmoins que jusqu’au printemps 1934, la troupe ne voulut pas complètement abandonner le marché allemand, mais que finalement elle resta en France. En 1937, lorsque James Michael se rendit au consulat allemand à Paris afin de renouveler son passeport désormais périmé, celui-ci lui fut confisqué. L’officier consulaire justifia ainsi cette mesure : « Vous n’êtes plus Allemand. Il n’existe pas d’Allemands noirs ». Dans une interview postérieure, James Michael décrira cette scène comme le pire moment de sa vie. Dès lors, il dut vivre en France dans l’illégalité mais fut relativement chanceux puisque le cirque Amar le soutint et continua de l’employer en secret. Lors des contrôles de police, des collègues le cachaient.

Après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, l’acrobate rejoignit la troupe de sauteurs marocains « Agadir » qui était en route pour le protectorat français du Maroc. Afin de pouvoir entrer au Maroc, il reçut la carte d’identité et les documents personnels d’un ancien membre de la troupe et sur lesquels il apposa sa photo. Cependant, à la suite d’une dénonciation, il fut arrêté fin 1939 par la police franco-marocaine qui le soupçonnait d’espionnage. Après deux mois de rétention à Casablanca, les autorités levèrent la suspicion d’espionnage et lui donnèrent le choix soit d’être interné mis dans un camp pour « ressortissants d’un pays ennemi », soit de s’engager dans la Légion étrangère. Il choisit la seconde option et survécut à la guerre.

James Michael reçoit une décoration militaire (Archives privées de Theodor Michael, Cologne)

James Michael servit dans la Légion étrangère durant seize ans. Il fut décoré à plusieurs titres et reçut notamment la Médaille Militaire et fut fait Chevalier de la Légion d’Honneur. Au cours des années cinquante, il revint en Allemagne comme citoyen français et s’installa en Rhénanie. Jusqu’à sa retraite, il travailla pour la Mission économique et commerciale française de Cologne. Il mourut en 2007 à l’âge de quatre-vingt-onze ans.

Auteur : Martin Holler

Sources :

Reed-Anderson, Paulette: Rewriting the Footnotes. Berlin und die afrikanische Diaspora – Berlin and the African Diaspora. Berlin 2000; Michael, Theodor: Deutsch sein und schwarz dazu. Erinnerungen eines Afro-Deutschen. Munich 2013; Lewerenz, Susann: Geteilte Welten. Exotisierte Unterhaltung und Artist*innen of Color in Deutschland 1920-1960. Cologne 2017; Thalken, Michael: Trauer um einen „schwarzen Deutschen“. In: Kölner Stadt-Anzeiger, 16.8.2007; Das Programm. Organ der Internationalen Artisten-Loge, years 1929-1934; Telephone conversation with Theodor Michael, 1.8.2018.

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